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S21 - Voyage au bout de l'Enfer

  • aschiettecatte
  • 29 janv. 2019
  • 3 min de lecture


J’avoue que je connaissais très peu l’histoire du Cambodge avant de débarquer à Phnom Penh et que j’étais assez ignorante du terrible génocide qui frappa la population de 1975 à 1979. Je savais néanmoins que la prison de Tuol Sleng, mieux connu sous le nom de S21, était un incontournable lors d’un séjour dans la capitale cambodgienne. Mais comment la visiter ? Car ce musée sur le génocide n’est pas vraiment un lieu pour les enfants... . Avec Fred, on finit par se dire que l’on fera cette visite à tour de rôle. Pas le choix ! Heureusement, Neary (et oui, toujours elle ;-)), nous propose tout naturellement de garder nos enfants pendant quelques heures car, nous dit-elle, pour vraiment comprendre le Cambodge et ses habitants, il faut connaître cet épisode douloureux de son histoire et se rendre compte des atrocités commises il y a à peine 45 ans.


Nous voilà donc partis, en amoureux, si on peut dire, pour découvrir ce centre de détention au beau milieu de la ville.

Comment imaginer que ce lieu, un ancien lycée, où retentirent jadis si souvent les rires des enfants et qui était un sanctuaire dédié au savoir, fut témoin des pires atrocités et un des trop nombreux exemples de la cruauté de l’homme ? Dès l’entrée, le silence qui enveloppe ces lieux me frappe. Alors qu‘en ville, le bruit et le chaos règnent, ici,  personne ne parle et le regard de chacun se fige devant la galerie de photos où victimes et bourreaux nous fixent du regard... . Je traverse les différents bâtiments en écoutant, à travers un audio-guide très bien réalisé, les atrocités qui ont été commises au nom du régime de Pol Pot, le numéro 1 du Parti communiste du Kampuchéa. Tout naturellement, on se sépare et on fait la visite, chacun de notre côté... . On sent bien qu'appréhender l'histoire de ces murs nous frappera en plein coeur ! 



Les cellules collectives ou individuelles sont vides mais les traces du passé sont bien là. On découvre avec horreur les traces sur le sol, là où hommes, femmes et enfants étaient cloués, parfois même reliés entre eux par des longues barres de fers et attachés par des anneaux en fonte. Interdiction de bouger, voir même de simplement se redresser sans demander l’autorisation à son bourreau. Enchainés comme des bêtes, à peine nourris, en attendant de passer, parfois plusieurs fois par jour, devant leurs tortionnaires pour qu’ils avouent des crimes qu’ils n’ont jamais commis. Des bourreaux qui, pour la plupart, étaient âgés entre 8 et 16 ans. De simples enfants, souvent issus des campagnes, sans instruction, à qui l’on inculque comment interroger, torturer pendant des heures et sans émotion les soi-disant opposants au régime. Malgré l’horreur, je suis néanmoins touché par ces jeunes visages et leur enfance volée !



Pendant presque 2 heures, je déambule de bâtiment en bâtiment, de cellule en cellule (autrefois des classes), pendant qu’une voix posée me relate les faits et me raconte les histoires de ces hommes et femmes qui ont connu l’enfer, simplement parce qu’ils avaient de l’éducation ou parce qu’ils portaient des lunettes (signe de savoir soi-disant). J’écoute aussi les témoignages des quelques survivants (seuls 11 dont 7 hommes et 4 enfants sur environ 18.000 ayant franchi les grilles de cette prison). Même si tous n’étaient pas torturés à S-21, les conditions de détention étaient telles que la fin était inéluctable. La prison était d’ailleurs indiquée à l’époque par la population comme « là où les gens entrent mais ne sortent jamais... » et le droit de vie ou de mort incombait aux dirigeants de la prison. Les fils barbelés qui entourent les couloirs des bâtiments devaient d'ailleurs empêcher tout prisonnier d’essayer de se suicider en se jetant par les fenêtres ! Aucune exécution ne se fera sur place mais bien dans les Killing Fields de Choeung Ek, à environ 15 km au sud de la ville. Ici, à S-21, on détient, on interroge, on torture, on affaiblit le corps et l'esprit... mais on ne tue pas.

Quelle cruauté insoutenable !


Sur le chemin du retour, Fred et moi parlons peu, encore sous le choc de ce que l'on a vu et entendu. Cette visite nous a profondément bouleversé mais nous permettra effectivement peut-être de mieux comprendre ce peuple que nous allons côtoyer ces prochaines semaines. 

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